Le 11.08.04 Par Dam

Etre transsexuel

De prime abord vous allez me demander pourquoi j’écris un article sur ce sujet dans vive les rondes, tout d’abord parce qu’il se trouve que je suis rond moi même et que sur la page d’accueil de vive les rondes on peut lire « Ce web est destiné à informer, et soutenir les femmes rondes, les hommes ronds, et plus généralement tous ceux qui sentent une pression sur leur image physique au quotidien. Nous incitons nos lecteurs à s’affranchir du diktat de la minceur et du physiquement correct ! »

Alors je me suis dit que je pourrais un peu vous parler d’un sujet un peu tabou dans notre société mais qui est un vrai calvaire et un vrai problème pour celui ou celle qui le vit au quotidien, un peu comme les personnes rondes donc…

Tout d’abord je me présente. J’ai 26 ans, je vis à Paris et pour conserver un peu d’anonymat on me surnommera Dam (Damien) et bien évidemment je suis transsexuel FTM

.

Qu’est ce que veut dire ce terme eh bien plus simplement que je suis un homme prisonnier d’un corps féminin (waouhh ça existe ça vous allez me dire ? Malheureusement oui ça existe).

Et là je sens les commentaires (waouhhh doit être malade dans sa tête !)

Non au contraire, il n’y a pas plus sain d’esprit que moi, au dire de mon psy (ah psy ça veut donc dire que finalement ça va vraiment pas bien dans sa tête !)

Eh bien non, mon article est justement là pour tenter de vous expliquer certaines choses sur les transsexuels et notamment sur le parcours que l’on doit accomplir pour enfin devenir soit même malgré les embûches que la société et la législation française nous mettent sur la route.

Tout d’abord être transsexuel ce n’est pas être maladec’est simplement qu’à la naissance, dame nature a un peu raté son coup, elle n’a pas fini ou omis de finir le boulot dans le ventre de la mère et on se retrouve sans l’avoir voulu avec un corps de femme alors qu’on est un vrai petit gars.

Ca commence très vite dès lors que l’on peut parler et prendre des décisions, vers 3-4 ans, on ne veut absolument pas mettre de jupe, on préfère jouer avec les copains, les filles c’est trop nulle ça chiale tout le temps pis jouer à la poupée c’est gonflant, non moi je préfère les playmobils, les petites majorettes et faire les 400 coups.

Puis au collège, on a nos premiers émois, nos premiers coups de coeurs pour la petite copine d’à côté avec qui on se lie très vite d’amitié pour pouvoir l’aborder plus souvent et plus rapidement que les autres mecs, sauf que… Bah sauf que on ne pourra malheureusement pas aller plus loin, pas un petit flirt, pas de petits bisous, pas de première petite copine, alors on se demande si on est pas homosexuel ?

On commence à se torturer l’esprit, à ne plus savoir où on en est et là , la tuile, les mecs nous draguent, arf l’horreur absolue !

Alors qu’est qu’on fait ? On mange pour se rendre difforme (attention ça n’est pas le cas de tous les transsexuels mais pour moi ça a été la meilleure solution pour faire fuir les mecs qui ne pouvaient pas savoir mais qui me draguaient moi un des leur).

Et puis un jour après de multiples questions, de multiples interrogations sur soit, sur ce qu’on est, sur ce qu’on croit être ou inversement on en vient à la solution :

JE SUIS UN HOMME MAIS J’AI UN CORPS DE FEMME

Le mot transsexuel je l’ai connu plus tard en tombant par hasard sur un reportage et là ce fut le choc, on peut se faire opérer, devenir celui qu’on aurait toujours du être, alors je vais le faire sauf que…

Une fois la décision prise (parce qu’on juge que ça sera la meilleure solution pour soit et le remède à notre vie de galère, que ça sera notre renaissance) on ne se rend pas compte de tout ce qu’il faut affronter.

D’abord il faut le dire à la famille, aux amis, au collègues de boulot avec tous les risques que ça comporte (se faire virer par ses parents et être renié, ne plus avoir d’amis, et surtout se faire virer de son taf). Mais on se dit que quoiqu’il arrive, de toute façon c’est comme ça que je serai heureux, et pas autrement. Alors on se lance, en priant pour que ça se passe le mieux possible.

Ma famille, seul mes parents et mes soeurs sont au courant (bilan : une soeur qui s’éloigne, des parents qui savent mais ne veulent pas encore comprendre, mais je suis optimiste ça viendra et une autre soeur qui a été formidable), les amis (géniaux, ils l’avaient pressenti dans ma façon de faire, de dire les choses, de bouger, de m’habiller, de me coiffer, ils savaient mais ne pensaient pas que…) le boulot (à venir et là peut être que je vais me faire virer, c’est illégal faudra se battre, mais si mon bonheur doit en passer par là je le ferai).

Ensuite s’enchaîneront les séances de psy (il me faut son accord pour passer les étapes suivantes), puis prise d’hormone, puis opérations diverses, et enfin changement d’état civil pour enfin être Mr et non plus Melle.

Oh je sais, vous allez me dire pourquoi toutes ces tortures ça ne serait pas plus simple de rester tel quel, et de vivre avec une femme homosexuelle ?

Alors je vais vous répondre. Imaginez, si demain vous vous réveillez avec votre cerveau, mais que celui ci avait été mis dans le corps d’une personne de sexe opposé sans que vous le sachiez !

Vous allez acheter votre baguette le matin et quand vous rentrez à la place de Mr on dit Mme et inversement qu’elle sensation allez vous avoir ?

Quand vous rentrez à la maison, votre conjoint(e) va vouloir vous prendre dans ses bras et quand il va vous voir quelle réaction va-t-il avoir ?

Et vous avec ce corps allez vous accepter de vous faire toucher par une personne du même sexe ?

Ce sont toutes ces questions qui font qu’un jour on se dit que même si le parcours est semé d’embûches, notre survie et notre bien être en passe par là !

Alors, j’aimerais par ce message vous dire que parfois quand on parle de transsexuel, on fait trop souvent le lien avec folklore travestis, ou brésilien/brésilienne alors que ce n’est pas le cas.

On est comme vous, on vit comme vous, on travaille comme vous, sauf que derrière l’enveloppe que vous voyez, il n’y a pas celle ou celui que vous croyez mais quelqu’un d’autre qui ne demande qu’à s’épanouir dans sa vraie identité.

Quand on s’entend dire Melle alors qu’au fond de nous on est Mr les larmes intérieures pleurent chaudement en attendant qu’un jour en rentrant dans cette boulangerie pour acheter cette baguette toute chaude la vendeuse avec un petit sourire charmé par notre charme nous dise « Bonjour Mr vous désirez ? »

Dam

A lire :

Centre d’Aide, de Recherche et d’Information sur la Transsexualité et l’Identité de Genre (pleins de liens et d’infos).

Le transsexualisme : la longue marche du changement de sexe sur doctissimo.

Le protocole dans un parcours officiel transsexuel (Act Up).


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