Missy par Benoît Rivière, Hallain Paluku, et Svart.
Editeur : La Boîte à Bulles – Collection : Champ libre – ISBN : 2849530468 – Prix : 13,90€ – Broché: 78 pages – 2 novembre 2006.
Dire que la lecture de Missy m’a touchée serait bien en dessous de la vérité…
L’histoire de cette « grosse » femme, récoltant les hourras et l’adoration des mâles en rut en faisant des strip tease dans un cabaret prend aux tripes, femme objet aux formes pleines, et qui pourtant se sent si vide.
Nombreuses seront celles qui se reconnaîtront dans le désespoir profond de cette fille de la nuit, terriblement désirable, mais pas au delà d’une nuit et qui se retrouve seule, tellement seule au petit matin, livrée à elle-même, seule avec sa honte, rejetée par les hommes qui la salissent et la consomment sans savoir l’aimer.
S’ensuit alors la
Missy a le regard voilé des gens qui ont trop souffert, se recroquevillant sur elle-même telle un œuf qui ne demande qu’à disparaître, gommer la différence, se bercer soit-même, prendre enfin cette tendresse qu’on lui refuse, et à laquelle elle refuse de croire, lorsqu’enfin elle survient… La véritable beauté est pourtant dans l’œil de celui qui regarde !
Un petit bijou de sensibilité, un cri de désespoir, la tragédie de « l’anormalité », qui voile la face à celui ou celle qui s’en croit atteint, et lui masque le bonheur qui parfois est à porté de main… Le graphisme est doux à l’œil et les personnages sans visage, les couleurs franches… un monde où l’apparence domine, où les corps prennent toute leur ampleur.
Vraiment, de la belle ouvrage !
« Etoile de cabaret la nuit, Missy redevient au matin cette grosse femme dont le monde entier se contrefiche. Une fois leur curiosité et leur désir assouvis, ses amants l’abandonnent invariablement au saut du lit… «
L’album :
Etoile de cabaret la nuit, Missy redevient chaque matin cette grosse femme dont le monde entier se contrefiche.
Une fois leur curiosité et leur désir assouvis , ses amants l’abandonnent invariablement au saut du lit. Rythmé
entre adoration et répulsion, l’équilibre de Missy ne tient qu’à un fil. Un fil sur lequel tire l’impitoyable Dud, le
gérant du cabaret.
Afin que les hommes cessent de ne voir en elle qu’un simple objet de fantasmes, Missy décide de maigrir, au
risque de perdre ce qui l’a imposée sur scène : ses formes généreuses .
Mêlant tristesse et tendresse, les auteurs mettent en scène toute la légèreté et l’hypocrisie humaine en matière de
séduction amoureuse. Un dénommé Mario, tapi dans l’ombre du comptoir du cabaret, la regarde chaque soir
d’un oeil énamouré. Mais que peut raisonnablement espérer cet homme laid de la plantureuse Missy ? Lever le
voile des apparences semble bien difficile dans cette histoire…
Points forts :
Sensuel, envoûtant, charnel, ce récit aux contours généreux entraîne le lecteur dans un tourbillon de formes.
Sans cliché, les auteurs mettent en scène une histoire d’amour et de désespoir qui fera fantasmer tous les
lecteurs, y compris ceux qui croyaient jusqu’alors ne pas aimer les rondes.
Pour cette histoire toute en sensualité et sentiments, les auteurs ont osé et réussi le pari de ne pas donner de
visages à leurs personnages. L’émotion n’en est que renforcée.
Les auteurs :
Né en 1977 à Kinshasa au Congo, Hallain Paluku s’amuse dès l’âge de 11 ans à donner des traits africains aux
planétaires Tintin, Gaston, Boule et Bill, etc. Illustrateur de presse, il se rapproche progressivement de l’univers
BD grâce à divers ateliers, expositions et ouvrages collectifs. Le premier dessin de Missy date de 1999, suite à
une rencontre amoureuse. Son patronyme vient de « Missy Elliott », une rappeuse américaine.
Sa rencontre avec Benoît Rivière transforme l’idée en album. Chroniqueur BD pour divers journaux, Benoît
démarre son parcours de scénariste sur les chapeaux de roues .
Dans la foulée de Missy, son premier album, il publiera en 2007 un polar aux éditions Delcourt.
Svart a récemment collaboré à 2 albums de la collection EP Jeunesse : Les 3 petits cochons et Les sept nains et demi.
Pour les éditions Delcourt il réalise les couleurs de Les Hydres d’Ares et de la suite de Maxime Murène.