John Fante , fils d'émigré italien arrivé en amérique au début du 20e siècle, nous a laissé une oeuvre autobiographique dans laquelle son avatar de papier, Arturo Bandini,
se livre au lecteur dans ses aventures les plus intimes et son égoïsme le plus crasse... "Bandini" relate son enfance, "Demande à la poussière" ses années de misère à essayer de fourguer des scénarios à hollywood... "Les compagnons de la grappe" ses relations houleuses avec un père ivrogne et violent", "Pleins de vie" ses interrogations devant sa femme enceinte, se transformant sous ses yeux en énorme boule de bonheur auquel il se sent de plus en plus étranger... de nombreux titres qui égrennent le fil de la vie de Bandini et de son double créateur, John Fante, car cet être accariatre, méprisable, égoiste, c'était lui même... jusqu'à "mon chien stupide", chroniques de ses vieilles années, dans sa villa luxueuse, auprès de sa femme (patiente), ses enfants désormais adultes et partis, et de son chien (stupide)... il y a bien d'autres livres, je ne vais pas tous les énumérer...
J'ai aimé ce personnage atroce, comme on ne peut pas s'empêcher de gratter une plaie qui fait mal ! je le détestais et pourtant, dès que j'avais achevé un livre, malgré toute ma réprobation que générait les paroles et les actes de cet odieux personnage, je courrais en acheter un autre... parce que Bandini/Fante, c'était lui, c'est aussi toute la misère humaine, son égoisme et sa fragilité face à une vie de merde dans laquelle on se débat pour ne pas sombrer...
le mieux dans tout ça, c'est que l'un de ses fils, Dan Fante, a pris la releve avec une écriture non moins brillante que celle de son père, dans la déglingue également... et de manière tout aussi autobiographique : son premier roman "Les anges n'ont rien dans les poches" raconte même son incapacité à aller à l'enterrement de son père, John Fante, décédé en 1983... livre par ailleurs dédicacé à "mon frère, mort d'alcoolisme, écrasé comme un chien"... bonjour la famille :? s'ensuivirent "en crachant du haut des buildings", "la tête hors de l'eau", dans la veine aussi d'un Hubert Selby Jr sous acide...
cette famille de looser, on la suit du début à la fin, on rit et on pleure avec elle, on la déteste et on s'y voit peut être un peu trop pour les aimer vraiment, un peu trop pour les détester réellement...
pas étonnant que Charles Bukowski ait ressenti un tel choc lorsqu'au hasard des rayonnages d'une bibliothèque, il découvrit "Demande à la poussière", dont il préfaça plus tard une réédition et qui lui inspira, dans sa propre écriture, l'entrée en scène de son avatar littéraire Henry Chinasky...
j'ai aimé "demande à la poussière" au point de le relire 3 fois de suite... j'ai aimé ces êtres déglingués, souffrants, emprisonnés en eux-même, perclus de défauts et de douleurs, et en même temps tellement libre dans leur haine de tout et avant tout d'eux-même...
et vous ? les aimez vous ? ;)