Bon, je m'y colle...
J'ai trois générations d'exemples autour de moi, mon grand-père (le papa de ma mère), mon géniteur et celui de mon conjoint, et mon conjoint (papa de ma fille)...
Concernant mon grand-père, il a été un père "de son époque", mais pas tant que ça, en fait... je pense qu'il avait un rapport à ses enfants plus proche que la plupart des hommes de sa génération... d'ailleurs il est toujours vivant (87 ans) et adore toujours les enfants... C'était lui qui bossait pour nourrir le foyer, donc il rapportait la paie et ma grand-mère gérait tout... sauf que le matin, c'était lui qui préparait le petit déj pour la maisonnée, et ma mère et ses frères en garde des souvenirs émus... D'ailleurs, c'est un homme qui est excellent cuisinier, et tous les dimanches de sa vie, pendant ses 40 années de boulot, c'était lui qui était aux fourneaux, personne n'avait le droit d'entrer dans la cuisine, c'était son plaisir... pas vraiment conventionnel pour un homme de sa génération... Le première souvenir de ma mère, c'est quand elle avait 2 ou 3 ans, assise en équilibre sur la cuisse de son papa, qui lui laçait ses chaussures... Il était proche de ses enfants, mais était quand même sévère, ses gosses le craignaient, il représentait l'autorité suprême, que ma grand-mère brandissait en cas de bêtises "tu vas voir ton père ce soir quand il va rentrer"... d'ailleurs, il a fait pareil avec moi quand elle me gardait, elle me menaçait de mon grand-père, alors qu'avec ses petits enfants, il a toujours été très cool, disponible (et retraité) et qu'il faisait plein d'activités avec nous (pêche, vélo, cueillette des champignons, ramassage d'escargots, cuisine...) Je pense qu'il a été un père attentif, et qu'il y avait un équilibre dans le couple parental qu'il formait avec ma grand-mère, mais dans la complémentarité, pas dans l'égalité... ils ne faisaient pas les mêmes choses avec leurs enfants, mais ils en faisaient autant, proportionnellement au temps dont ils disposaient chacun, puisque mon pépé travaillait et que ma mémé était à la maison et s'occupait des gamins...
Du côté de mon géniteur : mes parents n'ont jamais été vraiment ensembles, pour mon père, une aventure de vacances, pour ma mère le coup de foudre... et un polichinelle dans le tiroir 8 jours plus tard : moi... Mon père n'a pas souhaité s'investir auprès de nous, n'a jamais payé un centime pour moi, me rendait visite un jour par an jusqu'à mes 8 ans, puis n'est plus venu... j'ai repris contact à mes 18 ans (ce que j'aurais pu faire avant mais ne le souhaitait pas) et il n'a rien trouvé d'autre à faire que de reprocher à ma mère mon éducation, et à moi mon physique et mes choix de vie (dans cet ordre :lol: )... nous nous sommes brouillés, puis j'ai encore repris contact lorsque j'ai eu ma fille, nous nous sommes revus un peu puis nous nous sommes refâchés, car entre ses remontrances sur mon physique et mes choix de vie (il ne peut pas blairer soslan), c'était en plus sur ma réorientation professionnelle et ma façon d'élever ma fille ("tu vas quand même pas l'allaiter ??? y a des façons de nourrir les bébés correctement, maintenant"... :roll: ), et ses prédictions apocalyptiques pour l'avenir "elle ne sera QUE ce que vous en ferez".... et autres délires sur les liens du sang... bref...
Soslan (mon conjoint, donc) c'est une histoire différente, mais quand même... ses parents étaient mariés, et il a une grande soeur de 6 ans son ainée... il a été conçu pour recoller les morceaux d'un couple qui ne fonctionnait déjà plus, mais il n'a pas suffit... quand il avait 6 ans, son père s'est barré... il le voyait juste pendant les vacances, et puis de moins en moins... cet homme a refait sa vie, a eu d'autres enfants... Soslan a repris contact avec lui vers ses 20 ans, mais son père l'a jugé indigne d'être présenté comme son fils... forcement, abondonné par son père à 6 ans, sa mère ayant coulé une biele suite à ça, ben il a foiré ses études, et n'a rien fait, a quitté l'école à 15 ans... bref... donc là, ils ne se sont pas vus depuis 15 ans, ce monsieur vit dans la même ville que nous, mais ne sait même pas que son "fils" a eu un enfant... super, quoi... du même tonneau que le mien... des mecs plus préoccupés par leur carrière que par l'humain... des ravages dans les familles, ce genre de trucs...
Enfin, le papa que je vois tous les jours, c'est mon conjoint... il est super papa avec notre fille, et a pris sa place dès ma grossesse, toujours aux petits soins, etc... il n'a pas eu peur comme certains papas face à un nourrisson, il a fait ce qu'il y avait à faire, il m'a relayée, et nous sommes aussi présents l'un que l'autre auprès de notre fille... Il est évident pour moi que sa propre expérience d'abandon avec son père a joué sur le lien qu'il a souhaité mettre en place avec notre fille, il voulait être un "vrai papa", pas comme le sien... et il s'y emploie avec force et détermination, car il a trop souffert de cette absence lors de son enfance, et même dans sa construction adulte...
De mon côté, j'ai été élevée par ma mère seule, mais j'avais mon pépé comme figure paternelle proche (je le voyais quotidiennement) et il représentait pour moi une forme d'autorité, même si il ne m'a jamais talochée, il suffisait qu'il me menace pour que ça me calme de suite... :lol: J'ai vu ma mère triste dans sa solitude, et assumer à bouts de bras son statut de "fille-mère" à une époque où c'était très mal vu... elle a trimé pour que je ne manque de rien, il n'y avait jamais de poses, puisqu'elle n'avait personne a qui passer le relais... Du coup, la place que j'avais auprès d'elle était faussée, puisque j'étais en quelque sorte le second élément du "couple" que nous formions.
Je ne souhaite ça en aucun cas à ma fille, et il est important pour moi que son père soit là, dans son quotidien. Nous sommes parents, il est autant "papa" que je ne suis "maman", ça me parait important... Nous sommes plus dans l'égalité que dans la complémentarité, puisque notre fille joue avec l'un et l'autre, prend sa douche avec l'un ou l'autre, est promenée par l'un ou l'autre (ou les deux), nourrie, changée, couchée, câlinée par l'un ou l'autre... nous faisons les mêmes choses, contrairement à mes grand-parents qui, comme je l'ai dit plus haut, étaient plus complémentaires...
C'est le sentiment global que j'ai, qu'on va de plus en plus vers un couple parental dans lequel les éléments (maman et papa, ou papa et papa, ou maman et maman) ont des rôles moins définis qu'il y a une ou deux générations... Je ne sais pas si c'est bien ou mal, c'est l'évolution de la société qui veut ça, ou les femmes ont gagné leur indépendance, travaillent, font les mêmes activités que les hommes, les caractéristiques féminines et masculines sont plus mélangées, plus floues...et ça se ressent sur la façon de s'occuper des enfants, je trouve... Sans compter que ce n'est plus vu comme un aveu de faiblesse pour un homme d'avoir envie de materner (ou paterner)...