INFO LE FIGARO - Une étude de la Cnam a évalué les risques imputables à ce médicament retiré en novembre dernier.
Mediator, le médicament des laboratoires Servier réservé à l'origine aux diabétiques en surcharge pondérale puis prescrit aux patients désireux de perdre du poids serait responsable de 500 à 1000 décès en France. C'est ce qui ressort d'une étude confidentielle de la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) dont Le Figaro a pu avoir connaissance. Suite à une saisine de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), les médecins de la Cnam ont passé à la loupe le devenir médical des patients ayant pris du Mediator. L'objectif étant d'évaluer le nombre d'hospitalisations et de morts potentiellement liés à ce médicament. Selon d'autres travaux réalisés au Centre hospitalier de Brest, le risque de complications graves liées à ce médicament serait de l'ordre de 0,5 cas pour 1000. Celles-ci surviendraient pour des traitements d'au moins quelques mois.
L'Afssaps a commandé cette étude dans un contexte de judiciarisation, plusieurs malades ayant porté plainte contre la firme Servier (deuxième groupe pharmaceutique français après Sanofi-Aventis) du fait de complications cardiaques consécutives à la prise de Mediator. Par ailleurs l'Agence du médicament a également été critiquée par les plaignants et leurs avocats pour avoir tardé à retirer cette molécule du marché. C'est 33 ans après sa commercialisation et dix ans après la première déclaration de pharmacovigilance en France que le Mediator a été suspendu. Ce produit, un dérivé des amphétamines est chimiquement proche d'un autre produit de Servier, l'Isoméride, retiré lui de la vente en 1997.
Les chiffres de l'étude de la Cnam confirmeraient donc ceux parus dans la thèse de doctorat d'Etat de docteur en pharmacie soutenue par Flore Michelet à l'université de Rennes il y a quelques mois. «La situation est grave, cette histoire va mal se terminer, nous confiait récemment un expert reconnu en pharmacovigilance. Le jour où les chiffres vont sortir, il va y avoir un scandale terrible».
Le Mediator est accusé d'avoir des effets secondaires particulièrement graves en favorisant les maladies des valves cardiaques et l'hypertension pulmonaire. Dès 1997, le New England Journal of Medicine, l'une des plus prestigieuses revues médicales américaines publiait un article détaillant les effets néfastes du dexfenfluramine sur les valves cardiaques. D'autres publications scientifiques suivront notamment dans Plos One. La toxicité cardiaque de leur métabolite commun est reconnue en 2000.
«J'ai demandé à l'Afssaps, en ma qualité de rapporteur spécial de la Mission Santé pour la Commission des Finances de me fournir l'étude de la Cnam», explique le député Gérard Bapt. Quid des patients qui ont pris du Mediator pendant des années? Le Dr Irène Frachon, pneumologue au CHU de Brest, auteur d'un livre paru en juin (Mediator, sous-titre censuré) estime qu'une surveillance s'impose. « J'ai fait part à l'Afssaps de ma préoccupation. Nous voyons régulièrement à l'hôpital de Brest des malades hospitalisés pour insuffisance cardiaque grave et qui s'avèrent être des victimes «qui s'ignorent» du Mediator, explique-t-elle. Le risque que le traitement médical ou chirurgical soit inadapté ou trop tardif est alors important. Il faudrait que les patients qui ont été significativement exposés au Mediator soient invités à consulter un cardiologue avec réalisation d'une échographie cardiaque. Ce repérage est possible grâce aux données de la Cnam, données qui sont cependant supprimées au bout de 3 ans ».
Quand le Mediator a été retiré du marché en novembre dernier, 300.000 personnes étaient sous traitement en France. Chaque année, sept millions de boîtes étaient vendues dans notre pays.
Voilà j'imagine que Cocagne dort à cette heure ci :)