Et si on arrêtait de se prendre la tête et qu'on se mettait à lire les livres qu'on aime, tout simplement?
Halte là ami élitistes: je ne renie certes pas les classiques.
Mais combien de gamins ont été écoeurés à jamais de la littérature parce qu'un prof leur a fait subir à 12 ans "le père Goriot" (ciel, que ce bouquin était chiant... à la fin je n'en lisais plus que les dialogues pour suivre seulement la trame narrative)?
Pourquoi ne ferait on pas lire aux gamins des oeuvres plus ludiques? Pourquoi l'immense Raymond Queneau est il exclu des programmes de français, comme si sa fantaisie était honteuse face à l'ennui dantesque distillé par Flaubert? Pourquoi ne fait on pas lire aux adolescents un bouquin comme "L'attrappe coeur", quand ils ont encore l'âge de comprendre Holden Caufield? Pourquoi fait on lire du Proust à un gamin de 15 piges pour qui terminer "L'équipe" est déjà un exploit, à un âge où de toute manière il n'en saisira pas toute la quintessence?
J'ai eu la chance d'avoir une excellente prof de français en seconde qui nous avait fait l'offre suivante: chacun était libre de choisir le bouquin de son choix. N'importe lequel. Oui, même le dernier Pascal Sevran. La contrepartie étant de convaincre ses camarades de l'enthousiasme qu'a suscité en lui le bouquin. Et bien pour la seule fois de ma vie d'écolier/collégien/lycéen, j'ai vu une classe entière qui s'éclatait en se recommandant des bouquins. Ah, Madame Dupuis, où que vous êtes, que vous soyez bénie... Ce qu'avait compris Mme. Dupuis, c'est que l'élève devait être libre de dire ce qu'il pensait d'un livre, que l'important était qu'il prenne goût à la lecture, et qu'il était stupide de nier à quelqu'un le droit de ne pas aimer Zola (personnellement, je l'exècre) sous pretexte que "ah non, c'est un classique, tu n'as pas le droit de ne pas aimer!".
Peu importe que vous aimiez Camus ou que vous le considériez comme une sous-merde. Bon, dans le second cas je dirai en toute subjectivité et avec toute l'arrogance qui me caractérise que vous êtes un crétin, c'est vrai.
Mais ce qui importe c'est de prendre un livre que l'on apprécie, un livre qui nous apporte quelque chose, voire dans le meilleur des cas qui nous accompagnera dans notre vie, comme un vieux copain auquel on rendra visite de temps en temps pour se souvenir des premiers émois lors de sa première lecture, alors qu'on humera le délectable parfum fâné des pages vieillissantes...
Je suis persuadé qu'aujourd'hui "Harry Potter" apporte bien plus le goût de la lecture à des millions de marmots que toutes les oeuvres de Racine enfoncées à coup de burin dans le crâne des élèves.
Classique ou non, l'important est de lire un livre qui va déclencher ce paradoxe jouissif arrivé à sa fin: la joie d'avoir lu une oeuvre splendide et la frustration de le voir déjà terminé...