Je me sens vraiment concernée par ce que tu dis : dans ma famille, le fonctionnement est le même, sauf que les problèmes sont beaucoup moins graves (ma soeur dérape moins que ton frère, elle a une scolarité à peu près normale, mes parents ont divorcé mais pas de menace de suicide). J'ai toujours porté cette responsabilité de me préoccuper du bon fonctionnement de la famille, de gérer ma soeur, de la "sauver" quand elle faisait des bêtises, de "huiler" les rapports entre les gens, ma mère m'a d'ailleurs fait une crise quand j'ai quitté le domicile familial pour mes études dans une autre ville, car j'abandonnais le navire, en gros. J'ai culpabilisé à mort la première année.
Aujourd'hui, je ressens la même chose que toi. Ça me trouble un peu, mais je m'aperçois que je commence à m'en ficher un peu, de tout ça. Ça fait 10 ans qu'on répète la même chose, les mêmes problèmes, 10 ans que j'entends les mêmes plaintes de mes parents sur ma soeur, la même demande de conseils à n'importe quelle heure (tant pis si j'ai des impératifs, je fais hotline pour problèmes familiaux lol), et le même refus de les appliquer, ou la même lâcheté dans leur application vague. Non seulement ils ne m'écoutent pas et laissent tout passer à ma soeur (ils me demandent quoi faire mais ne suivent pas du tout les conseils auxquels j'ai pris le temps de réfléchir), mais je m'aperçois que si un conflit m'oppose à elle, ils prennent systématiquement son parti. Ils ne veulent pas la contrarier. Quitte à abîmer leur relation avec moi, sans même y penser.
Aujourd'hui, j'ai ma vie. J'ai des amis, j'ai un fiancé, j'ai même un chat lol. Et ils méritent d'être le centre de mon attention désormais. Il y a quelques temps, mon fiancé m'a dit qu'il souffrait un peu de toujours passer après, dans mes préoccupations, après eux. Il m'a dit qu'il était ma famille, lui aussi. Qu'ils ne méritaient pas tant de tourments, et ne se souciaient pas autant de moi.
Je sais qu'il a raison. Je crois qu'il est temps que je cesse d'être "l'aînée". Maintenant je suis aussi "l'amie", "l'amoureuse", etc.
Ne te sens pas coupable de ce détachement que tu ressens : il est normal, sain, à cet âge on construit sa propre vie avec ses propres préoccupations. Est-ce qu'ils se soucient autant de tes états d'âme que tu te soucies des leurs ? En plus de ça, tu t'aperçois sans doute que tu n'y peux pas grand chose : ils ne t'écoutent pas, et de toutes façons, ce n'est pas ton rôle. Ce n'est pas de ton ressort : c'est une idée qui fait du bien, non ? ;)