Salut Ladyagathe,
D'abord je t'exprime mon soutien total. Il est parfois difficile à 18 ans de savoir qui on est, ce que l'on veut faire, et tout simplement pourquoi on est là. Je me suis posé exactement les mêmes questions à ton âge (j'ai exactement le double de ton âge)et continue de me les poser. Je n'ai pas de copine, ni d'enfant, je suppose que cela joue et incite davantage au repli sur soit que si l'on a des personnes "à charge" qui comptent sur vous. Nombre de parents expliquent que quand les enfants deviennent adultes et quittent le foyer, c'est très difficile car tout l'objet de leur vie n'est plus et se retrouvent donc seuls avec des questions qu'ils n'ont pas eu le temps de se poser quand ils s'occupaient des enfants (c'est particulièrement le cas des mères au foyer) ou qu'ils ont mis de côté inconsciemment. Tu pourrais penser à ce stade : "Mais quel est le rapport avec moi ?". Ce que j'essaie de t'expliquer c'est que ton questionnement (à quoi je sers ? qu'est-ce que je vais faire plus tard ? Pourquoi je suis comme ça ? ...) est naturel et touche pratiquement tout le monde sous une forme ou une autre, et que tous essayent d'y apporter une réponse. Ce qui diffère c'est la manière dont on arrive à traiter ces questions essentielles pour notre équilibre et notre vie tout court. Certains trouvent des pis-aller au travers de comportements déviants (addictions de toutes sortes...) mais la pluspart trouvent des réponses authentiques au travers du sport, d'activité culturelles, sociales, au travers du travail ...
Tu es au tout début de ta 1ère année de médecine : il serait intéressant que tu évacue un instant les questions existentielles et l'image dégradée que tu as de toi-même et réfléchisses au pourquoi de ce choix d'orientation qui n'est pas anodin (la médecine est une activité entièrement tournée vers les autres, ton choix d'orientation dans cette voie n'est donc probablement pas innocent). Ce que je peux te dire, c'est que perso j'ai fait une année de pharma (la 1ère année ressemble assez à celle de médecine avec de la chimie orga, chimie physique ... des connaissances très complexes à assimiler d'autant que tu te retrouve à la fac qui n'a rien à avoir avec le lycée) et que j'ai arrêté au bout de 3 mois car en y réfléchissant vraiment je me suis aperçu que devenir pharmacien ne me faisait pas rêver plus que ça (et vu la durée des études il vaut mieux être sûr de son choix) et j'ai fait un ptit boulot pour le reste de l'année puis ai complètement changé de voie par la suite. Après avoir travaillé quelques années, j'ai de nouveau changé de métier en intégrant une boîte d'informatique. Ce que j'essaie de te faire comprendre est qu'il est important de t'interroger sur ce que veux faire car dans la vie, on est aux yeux des autres (familles, amis, collègues, public) surtout ce que l'on fait. Qu'est-ce-que tu aimes dans la vie ? Aider les autres ? Travailler plutôt de manière autonome ou en équipe ? Travailler sur de l'humain, sur des machines ? Réfléchir ou plutôt agir ? ...
Il faut que tu puisses cibler tes aspirations. Peut-être me répondras-tu que précisément tu n'en a pas, que tu te sens nulle (la preuve plus personne ne t'appelle ...) mais en te lisant, je peux affirmer que tu te trompes : quelqu'un qui dit "je suis nulle" est surtout quelqu'un qui se remet en question et pas seulement quelqu'un de paumé. Crois-moi, nombre de gens n'ont pas ton honnêteté ni ton courage. Nombre de personnes rencontrées au cours de ma vie se sont avérées pleines de certitudes, de narcissime, et en apparence semblaient bien dans leur peau mais l'expérience m'a montré qu'il ne fallait pas se fier aux aspects extérieurs et que la réalité était beaucoup plus contrastée que celle qu'il voulait projeter d'eux-mêmes. Toi, tu t'interroges, et donc, non, tu n'es pas "nulle" mais bien consciente d'être repliée sur toi-même et que cela te fais souffrir. C'est déjà énorme en soit. Essaie de le prendre comme base de réflexion, de faire de ce qui te semble aujourd'hui comme "une tare" une force, et en parallèle de te lancer dans une activité qui t'épanouira. Je ne te connais pas donc il est difficile de dire quoi sur le moment, mais comme d'autres l'ont dit ici, il existe des associations de toute sorte, des clubs, des centres culturels, sportifs ... qui peuvent contribuer à te rapprocher des autres, à te sentir utile, appréciée, et te faire des amis et pourquoi pas un compagnon de route. Enormément de gens se rencontrent sur leur lieu de travail : le simple fait de partager une activité crée des liens, et tu découvriras des points communs avec d'autres. Quant au fait que tu n'ai plus d'amis, ce n'est évidemment pas définitif : cela arrive dans la vie de se perdre de vue, de bifurquer, de ne plus s’appeler parce que l'on a plus rien à se dire. Il ne faut pas voir là une fatalité, ni en vouloir à ceux qui s'écartent de toi car ils t'ont perçu comme étant fermée à eux. Le fait qu'ils se soient écartés de toi est naturel, humain mais ne signifie pas que cela soit définitif, ni même que ce soit uniquement de ta faute. Oublie cela pour le moment. Il est important pour toi que tu te "resocialise" et cela passera par de nouvelles rencontres plutôt que des amis perdus. Personnellement j'ai la chance de connaitre mes meilleurs amis depuis 25 ans mais j'en ai rencontré des tas d'autres en étant dans une association.
Pour ce qui est de ta réorientation, il me semble encore une fois essentiel de cibler ce que tu aimes. Pour prendre un exemple j'ai un ami qui est éduc spé qui s'est réorienté dans cette voie après avoir raté 2 fois la 1ere année de médecine et qui s'éclate aujourd'hui dans ce qu'il fait et ne changerait pas de job pour rien au monde. C'est juste une idée comme ça, mais si ta motivation de faire des études de médecine repose sur l'envie d'aider les autres (d'où l'importance de savoir pourquoi tu t'es lancé dans ces études qui plus est longues et difficiles), d'autres professions existent et peuvent être tout autant épanouissantes.
Comme l'ont dit d'autres ici, tu es jeune, tu as toute la vie devant toi. La vie passe vite, trop vite pour qu'on se la gâche à se dévaloriser. Nous avons tous des qualités au fond de nous, des aptitudes à faire partager. Personnellement quand je suis rentré au bas de l'échelle dans l'entreprise d'informatique dans laquelle j'ai passé presque 10 ans j'avais pas beaucoup confiance en moi, mais en travaillant et en échangeant avec des personnes plus agées, je me suis rendu compte que j'avais des aptitudes à exploiter. En quelques années, avec beaucoup de travail, je me suis retrouvé Directeur d'un important service avec plus de 150 personnes sous ma responsabilité, chose qui me paraissait impensable au début. J'ai arrêté l'année dernière ce travail bien payé pour faire autre chose, mais je me suis rendu compte que ce qui me plaisait surtout c'était d'aider les personnes sous ma responsabilité à elles-aussi évoluer. Tout ce qui me reste de ces années au sein de l'entreprise est une carte sur laquelle des collègues me remerciaient avec des mots parfois très touchants qui me font pleurer encore aujourd'hui quand je les relis. L'argent, la reconnaissance hiérarchique ... tout cela n'avait plus aucune importance en comparaison des mots qu'ils m'ont écrit. En réalité la réelle récompense que le type pas très à l'aise dans ses pompes que j'étais a eu fut le regard des autres, le respect mutuel et l'amitié qui en a découlé. Tu trouveras toi-aussi cette chaleur chez les autres, par un autre biais, le tien. On a tous besoin d'être aimés, appréciés, reconnus mais on ne peut l'avoir qu'en s'ouvrant. Je sais que c'est difficile quand on est dans la spirale négative mais le simple fait d'avoir posté ton mal-être ici démontre que tu aspires à en sortir. Il y a donc bien quelque chose de positif à cela et saches que tu n'es pas seule. Les autres réponses vont dans le même sens que la mienne : non, tu n'est pas ininteressante, nulle ... juste un peu perdue et en quête d'un bonheur que tu mérites comme tout le monde. Mais ce bonheur est probablement de l'autre côté de la porte que tu ouvriras quand tu iras dans une association ou autre pour faire quelque chose qui te plais. Une dernière chose : réfléchis ... mais pas trop non plus car à 18 ans on agit, parfois on se trompe et on se casse la gueule mais on se relève plus fort. La vie est ainsi faite. On prend souvent des coups et plus on avance en âge plus on perd de personnes autour de soit, mais on en rencontre aussi de nouvelles qui nous enrichissent et on enrichit aussi les autres et on réalise que l'on compte pour les autres comme ils comptent pour nous. C'est ce qui rend la vie passionnante.
Prend soin de toi et n'hésite pas à nous dire où tu en es.
Amicalement,