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Vieille chanson du jeune temps

N
45 ans Nantes 36
Bonjour,
je voulais partager avec vous un texte du grand Victor Hugo que j'avais découvert à mon adolescence et qui a pris une autre valeur symbolique et plus contextuelle des années  
plus tard, ce texte me parle comme ci j'aurais pu l'écrire et c'est comme ci le narrateur c'était moi...

Merci Victor Hugo

Je ne songeais pas à Rose;
Rose au bois vint avec moi;
Nous parlions de quelque chose,
Mais je ne sais plus de quoi.

J'étais froid comme les marbres;
Je marchais à pas distrais;
Je parlais des fleurs, des arbres;
Son oeil semblait dire : "Aprés?"

La rosée offrait ses perles,
Le taillis ses parasols;
J'allais; j'écoutais les merles,
Et Rose les rossignols.

Moi, seize ans, et l'air morose.
Elle vingt; ses yeux brillaient.
Les rossignols chantaient Rose
Et les merles me sifflaient.

Rose, droite sur ses hanches,
Leva son beau bras tremblant
Pour prendre une mûre aux branches;
Je ne vis pas son bras blanc.

Une eau courait, fraîche et creuse,
Sur les mousses de velours;
Et la nature amoureuse
Dormait dans les grands bois sourds.

Rose défit sa chaussure,
Et mis, d'un air ingénu,
Son petit pied dans l'eau pure;
Je ne vis pas son pied nu.

Je ne savais que lui dire;
Je la suivais dans le bois,
La voyant parfois sourire
Et soupirer quelquefois.

Je ne vis qu'elle était belle
Qu'en sortant des grands bois sourds.
"Soit; n'y pensons plus!" dit-elle.
Depuis j'y pense toujours.

Paris, juin 1831.
Victor Hugo, les contemplations (1856).
B I U