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Expliquer la mort aux enfants.

51 ans 76 10598
Ainsi va la vie qu'on se retrouve forcément confronté un jour ou l'autre à la mort que ce soit d'un proche, d'un inconnu, d'un animal même.

J'aimerais savoir à quel moment  
vous en avez parlé à vos enfants? Dans quelles circonstances? Comment leur avez-vous expliqué? Pensez-vous qu'il y a des "erreurs" à ne pas commettre?...

A vos claviers!
O
45 ans 239
Il y a un article assez bien fait sur ce sujet dans le Ouest-France dimanche d'hier, dans le livret "famille" ... pour ceux qui peuvent avoir Ouest-France bien sûr ;)
66 ans Région parisienne 2214
J'avais toujours dit à mes enfants que quand on était très vieux et très fatigué, on mourrait et ainsi on se reposait d'une vie longue et bien remplie. Là-dessus, mon beau frère s'est tué en voiture à 34 ans et chacun a géré ça comme il pouvait.

Alros qu'il avait 4 ans, j'étais en voiture avec mon fils. Et d'un seul coup, il me demande s'il est VIEUX. Je luis réponds que oui par rapport à un bébé, mais que non par rapport à la population, et je lui demande pourquoi. Il me répond alors par une autre question : Est-ce vrai que l'on doit mourir un jour. Je lui réponds alors que malheureusement, oui. Il me dit immédiatement que j'aurais dû le lui dire avant. Je lui demande pourquoi, et il me dit qu'alors il aurais préféré ne pas naître.

J'ai appris ensuite que se trouvant dans une classe à double niveau (petits et petits/moyens), la maitresse avait proposé une activité et il s'est levé en se proposant de la faire. La maitresse lui a alors répondu qu'il était trop VIEUX, que c'était pour les petits. Et juste avant à la récré, un copain venait de lui dire que quand on était vieux, on mourrait.

Visiblement, le fait que je lui dise qu'il était jeune ne suffisait pas, il fallait qu'il l'entende dire par une "autorité".

Je suis allée discrètement voir l'instit et lui ai rapidement expliqué la situation, elle a réussi à glisser le lendemain à mon fils qu'il était très jeune, et il a été rassuré... pour quelques dizaines d'années je pense.
T
44 ans noisy le grand 1060
au revoir blaireau : c'est un livre au titre plutôt nul (mal choisi en français en tout cas), masi c'est un très beau livre sur la mort, qu'on m'a offert quand j'étais toute petite (j'ai su lire à 3 ans, donc pour m'expliquer quelque chose, on me filait un livre). Je pense qu'on peut le lire à un enfant mais bon... je ne suis pas sûre. Déjà moi il me fait encore pleurer, et l'enfant aurait du mal à m'entendre lire entre deux sanglots.

Je résume : Un blaireau qui était vieux meurt. Et ses amis de la forêt sont très tristes. Mais au fur et à mesure, ils se souviennent chacun de ce que Blaireau leur a appris (à faire des gateaux, à faire du patin à glace, etc.)

Mais bon, c'est pas gnangnan, c'est très poétique, pas empreint de religion, masi axé sur les émotions de ceux qui restent. Y a de très jolies illustrations automnales.
A lire même adulte, je trouve, quand on perd quelqun!
71 ans Charente Maritime 3080
Expliquer la mort à un enfant, ce n'est pas facil. Et surtout quand on s'accroche à des clichés. J'ai donc toujours cherché à préparer mes enfants à cette idée avant même qu'un proche ne meure.

Il est par exemple assez fréquent de coiser des animaux morts sur notre chemin. Leur état fait comprendre aux enfants que ce qu'on appelle dernier sommeil n'est pas un sommeil normal. On n'a jamais cette impression de cadavre rigide quand on dort. Mais parler de la mort comme du dernier sommeil peut donner ou aggraver l'angoisse de la nuit.

Cela permet aussi d'expliquer que la mort survient par vieillesse, mais aussi par accident ou par maladie. La radio et la télé donne alors d'autres occasions de parler de la mort. Mais ça nez doit pas être une obsession, et surtout le moyen de se demander comment peut-on éviter la maladie et les accidents pour profitter longtemps de la vie.

Mais surtout, quand quelqu'un est mort, un enfant à le droit à la vérité. Amener un enfant à un enterrement est le meilleur moyen de lui expliquer que nous disons adieu à un mort, et lui faire prendre conscience de cette réalité. Mais si le mort est très proche, alors prendre rendez-vous avec un pedopsychiatre pour en parler peu aider beaucoup. Idem, quand le père ou la mère a une maladie grave que le pronostic vital soit ou non en cause.

Et quelle que soit l'image donnée pour expliquer la mort, toujoiurs s'en méfier. Ainsi, une amie m'a expliqué que son neveu avait toujours très peur quand son père, pilote, prenair l'avion. Jusqu'à ce que l'enfant explique qu'il avait peur que son papa monte au ciel et ne redescende pas. Tout simplement, parce que à la mort de sa mère, on lui avait expliqué que maintenant elle était montée au ciel.
52 ans pépettesland 1803
Je sais ps trop mais il y a qq jours il semble qu'on ait commis une "bourde" avec le petit dernier (3 ans), justement en parlant de la mort avec le plus grand.
Sa grand mère était en train d'expliquer à son grand frère (5,5 ans) que qd les gens devenaient très vieux ils mourraient, que cela faisait partie des choses qu'on ne pouvaient pas éviter. Donc le grand était froidement en train d'expliquer à sa grand mère qu'elle était vieille et qu'elle allait donc mourir dans pas trop longtemps (l'est très mignon mon fiston non? Pis surtout hyper psychologue :? ) qd le petit s'est mis a éclater en sanglots ne disant que lui, il voulait pas mourir et qu'il avait peur de ça :cry: .
Il est resté au moins 10 min à sangloter dans mes bras.
Il avait pas peur de la mort des autres mais de la sienne à priori.
Ca m'a fait vraiment drôle de voir un si petit bout dans cet état alors qu'on pensait qu'il ne saisissait pas grand chose à la question.
Je pense qu'on en reparlera de manière plus concrète lorsque leur chat adoré mourra mais ils seront déjà plus vieux à ce moment.
71 ans Charente Maritime 3080
C'est bizare Finette. Pour qu'un enfant aussi jeune aie peur de la mort pour lui, il faut que "mort" ait pour lui une signification. C'est d'ailleurs pour cela que la mort est si difficile à expliquer aux jeunes enfants.
Lui avez-vous demandé de vous expliquer ce que veut dire mort pour lui ?

Je peux me tromper, mais les seuls cas à ma connaissance où un enfant, sans histoire apparente, a une notion aigue de la mort très jeune, c'est lorsqu'il perd son jumeau, y compris in utero.

Et quel que soit le motif, je pense que au contraire, il serait sage de vous ouvrir de cette peur avec un pédopsychiatre, plutôt que de la laisser s'enfouir.
60 ans 91 25732
Il y a quelques années, je me suis occupée d'une de mes petites voisines enceinte. Elle avait déjà une petite fille de 5 ans qui avait perdu son jumeau in utero. Julie connaissait l'histoire du "petit frère qui était parti" mais n'avait jamais posé de questions.

Malheureusement, la maman a fait de l'éclampsie, a accouché prématurément d'une petite fille qui ne pesait même pas un kilo et n'a vécu que quelques jours. Mon papa, avec qui Julie s'entendait très bien, est mort 10 jours après.

Ses parents ont expliqué à Julie que la petite soeur, Lou, était très malade et qu'elle était partie au ciel et que le papa de Patty était très malade aussi et qu'il était allé aussi au ciel.

Dans les jours qui ont suivi, Julie n'était pas comme d'habitude. On a mis ça sur le choc de la mort de personnes proches. Mais elle ne parlait plus beaucoup et refusait d'aller se promener.

Une dizaine de jours après, je lui ai demandé si elle voulait venir chez moi jouer avec les chats (Julie habitait l'étage en dessous du mien). Et elle a dit oui. On a joué un peu toutes les deux puis je lui ai demandé si elle voulait qu'on aille jouer dehors. Elle a refusé. Je lui ai proposé d'aller au Mac Do manger une glace. Elle a refusé aussi et m'a dit "je ne veux pas aller dehors".

J'ai demandé pourquoi... Et elle m'a répondu "parce que dehors il y a le ciel"... Je n'ai pas compris de quoi elle parlait et je lui ai demandé "pourquoi, tu n'aimes pas le ciel ?" et elle m'a dit "non, j'ai peur. Si je sors, le ciel va me manger, comme Lou et comme ton papa".

Nous sommes allées rejoindre sa maman et nous lui avons expliqué que le ciel n'était pas le ciel bleu qu'elle voyait dehors, mais un endroit où les gens vont quand ils sont morts. Alors elle m'a demandé si au ciel mon papa donnait des framboises à Lou (papa donnait chaque jour un petit ramequin de framboises de son jardin pour Julie) et nous lui avons dit que s'il y avait des framboises au ciel, il lui en donnait sûrement.

La mort est un sujet très difficile pour les petits (pour les grands aussi en fait...) et il faut faire attention de l'expliquer avec des mots simples et des références qui ne risquent pas d'effrayer l'enfant. Même s'il n'a pas la conscience de ce qu'est la mort, il a tout à fait conscience de l'absence et du fait qu'on ne revient pas.
52 ans pépettesland 1803
maria123 a écrit:
C'est bizare Finette. Pour qu'un enfant aussi jeune aie peur de la mort pour lui, il faut que "mort" ait pour lui une signification. C'est d'ailleurs pour cela que la mort est si difficile à expliquer aux jeunes enfants.
Lui avez-vous demandé de vous expliquer ce que veut dire mort pour lui ?

Je peux me tromper, mais les seuls cas à ma connaissance où un enfant, sans histoire apparente, a une notion aigue de la mort très jeune, c'est lorsqu'il perd son jumeau, y compris in utero.

Et quel que soit le motif, je pense que au contraire, il serait sage de vous ouvrir de cette peur avec un pédopsychiatre, plutôt que de la laisser s'enfouir.


Non, mon fils n'a pas perdu de jumeaux in utéro.
Ils n'ont d'ailleurs jamais été confrontés à la mort de qq qu'ils connaissaient jusqu'à maintenant.
Je ne sais pas trop pourquoi le petit a réagi comme cela.
C'est bizare, il semble plus conscient de ce que représente la mort et ses implications que son grand frère.
Qd il joue, c'est souvent qu'un des personnages de ses jeux meure à un moment mais cela ne provoque pas un drame chez lui.
L'objet (voiture, bonhomme, peluche, etc...) est mort et est retiré du jeu mais cela ne l'affecte pas plus que cela.
Pour lui cela semble "naturel", dans "l'ordre des choses".

C'est un petit bonhomme hyper bien dans sa peau, très équilibré et très vif, je ne pense donc pas devoir me précipiter chez un pédopsy; mais c'est clair que dès que l'opportunité d'en discuter se représentera nous en reparleront tranquillement.

Nous ne sommes pas croyants mon mari et moi, l'explication que nous donnons à nos enfants de la mort n'est donc pas empreinte d'images religieuses.
Nous leurs disons plus simplement que nous ne savons pas ce qui se passe après la mort. Nous savons juste qu'on ne peut plus voir la personne en vraie mais que peut être, lorque nous même nous mourrons, nous nous retrouverons.
Que peut être tout ce qui fait l'essence même de la personne survit qq part mais que nous, dans cette vie, nous ne pouvons plus la voir.

Comme personne n'est mort chez nous, peut être a t'il eu tout simplement peur de se retrouver tout seul si lui mourait en premier?
71 ans Charente Maritime 3080
finette a écrit:
Nous ne sommes pas croyants mon mari et moi, l'explication que nous donnons à nos enfants de la mort n'est donc pas empreinte d'images religieuses.
Nous leurs disons plus simplement que nous ne savons pas ce qui se passe après la mort. Nous savons juste qu'on ne peut plus voir la personne en vraie mais que peut être, lorque nous même nous mourrons, nous nous retrouverons.

C'"est très contradictoire, votre conception de la mort. Vous n'êtes pas croyant, mais vous croyez qu'il y a peut être un au-dela. Et il est troublant que ton enfant joue avec la mort. De mémoire, les miens n'ont jamais joué à la poupée qui meurre, et de mémoire, moi non plus. je me rappelle que lorque j'avais environ 10 ans, une de mes tantes m'avait demandé si je songeais à la mort. J'avais trouvé la question bizarre. Pour moi, je savais que, un jour, je mourrais, mais, pour moi, je n'y songais vraiment pas. C'était quelque chose d'irréel, comme deparler de la retraite à un ejeune de 20 ans.
L
42 ans 3913
maria123 a écrit:
finette a écrit:
Nous ne sommes pas croyants mon mari et moi, l'explication que nous donnons à nos enfants de la mort n'est donc pas empreinte d'images religieuses.
Nous leurs disons plus simplement que nous ne savons pas ce qui se passe après la mort. Nous savons juste qu'on ne peut plus voir la personne en vraie mais que peut être, lorque nous même nous mourrons, nous nous retrouverons.

C'"est très contradictoire, votre conception de la mort. Vous n'êtes pas croyant, mais vous croyez qu'il y a peut être un au-dela. Et il est troublant que ton enfant joue avec la mort. De mémoire, les miens n'ont jamais joué à la poupée qui meurre, et de mémoire, moi non plus. je me rappelle que lorque j'avais environ 10 ans, une de mes tantes m'avait demandé si je songeais à la mort. J'avais trouvé la question bizarre. Pour moi, je savais que, un jour, je mourrais, mais, pour moi, je n'y songais vraiment pas. C'était quelque chose d'irréel, comme deparler de la retraite à un ejeune de 20 ans.


enfin en même temps avec certains DA les enfants sont confrontés à la mort très tôt... Dans Bambi c'est super violent par exemple ou même rox et Rouki...
52 ans pépettesland 1803
maria123 a écrit:
C'"est très contradictoire, votre conception de la mort. Vous n'êtes pas croyant, mais vous croyez qu'il y a peut être un au-dela. Et il est troublant que ton enfant joue avec la mort. De mémoire, les miens n'ont jamais joué à la poupée qui meurre, et de mémoire, moi non plus. je me rappelle que lorque j'avais environ 10 ans, une de mes tantes m'avait demandé si je songeais à la mort. J'avais trouvé la question bizarre. Pour moi, je savais que, un jour, je mourrais, mais, pour moi, je n'y songais vraiment pas. C'était quelque chose d'irréel, comme deparler de la retraite à un ejeune de 20 ans.


Pas tant que ça.
Nous ne sommes sûr de rien, alors pourquoi ne pas leur dire ça plutôt qu'autre chose?
Partant du principe que rien ne se perd mais tout se transforme, pourquoi pas les être humains ?
De plus par "non croyant " j'entendais plutôt non attaché à une religion spécifique donc non croyant en un paradis, nirvana ou autre truc de ce style. Il est vrai que le terme était mal employé.
C'est également peut être une sorte de lacheté de notre part que de ne pas leur dire qu'une fois mort tout est fini, que la personne disparaît à tout jamais, qu'elle n'existe plus que dans les souvenirs de ceux qui reste.
Pour des enfants aussi jeune nous préférons laisser une porte ouverte, libre à eux plus tard d'ajuster le tir.

Pour ce qui est de jouer avec la "mort" quel enfant n'a jamais dit à un de ses camarades "pan, t'es mort!", je vois franchement pas où est le problème.
Et comme les miens font souvent des "bagarres" entre leurs jouets il me semble normal qu'il y ait des "pertes" parmi les troupes ;) .

Enfin mon fils n'est pas un cas particulier et j'ai déjà entendu parler pour certains enfants aussi jeunes, voire même plus jeune que mon fils, de leurs interrogations et de leur appréhension de la mort.
C'est aussi pour ça que je ne m'inquiête pas outre mesure ;) .

Pis bon, c'est vrai aussi que dans les dessins animés il n'y vont pas avec le dos de la cuillère (frères des ours, l'âge de glace 1, bambi, etc...) donc faut pas 'sétonner que les questions arrivent de plus en plus tôt (surtout qd il y a un grand frère).
A
55 ans là ou là... peut-être ici 451
Je vais surement en choquer plus d'un/une, mais moi j'ai toujours répondu aux questions de mes enfants comme à des adultes... et la question est vite venu... mon beau-père est mort depuis des années et tout petit ils sont venus sur sa tombe avec nous... puis très jeunes, ils ont été confronté à la mort de proches, alors c'est peut-être cru, mais je déteste mentir aux enfants.

Je suis adepte du "tout mensonge n'est pas bon à dire..." un jour ou l'autre on se le reprend dans les dents.

Pour moi un chat est un chat et ils ont le droit de le savoir et la mort est la mort... et ils ont le droit de le savoir aussi... même si ce n'est pas rose.
49 ans 17521
Tout d'abord je me permets de conseiller la lecture de l'excellent livre de Dana CASTRO "la mort pour de faux et la mort pour de vrai", chez ALbin Michel, dans la collection "Questions de parents", sorti en 2000...

Citation:
Réelle ou imaginaire, la confrontation avec la mort est, chez l'enfant, source d'un vif questionnement. Les adultes, mal à l'aise quand ils n'en font pas un sujet tabou, n'osent pas en parler avec lui. Pourtant l'enfant est sans cesse confronté à la mort, que ce soit dans les médias, les contes, les jeux, quand ce n'est pas dans sa vie personnelle. Dana Castro, psychologue clinicienne, aborde les questions que les parents peuvent se poser : - A quel âge l'enfant découvre-t-il la notion de mort ? - Que recouvre sa peur de la mort ? - Faut-il s'inquiéter de la forte présence du thème de la mort dans les jeux ? - Pourquoi la perte d'un animal domestique est-elle si douloureuse ? - Comment l'enfant perçoit-il le deuil que vit l'un de ses parents ou la maladie grave d'un proche ? - Que signifient ses éventuelles conduites suicidaires ? - Que représente pour l'enfant la mort d'un parent ? - Comment comprendre les réactions, parfois surprenantes, des enfants face à la mort ? - Quelle est la spécificité du deuil chez l'enfant ? Un ouvrage qui permet aux parents d'aborder plus facilement un sujet délicat et d'apporter ainsi une aide indispensable à l'enfant lorsque la mort survient "pour de vrai".


Ensuite... pour parler de mon expérience personnelle... Je suis issue d'une famille athée, ce qui n'est pas toujours aisé justement pour répondre au questionnement des enfants, mais c'est comme ça.

Ma première confrontation avec la mort a été le décès d'une de mes arrière-grand mère, j'était au CP... j'étais assez attachée à elle. Je copie/colle ce que j'ai écrit dans une note de mon blog La mort n'en saura rien :

Citation:
Elle est morte... moi je ne savais pas ce que ça voulait dire, "être morte"... on m'a juste dit que je ne la verrais plus. L'enterrement était en semaine, puisque j'étais restée exceptionnellement en étude, à l'école, le temps que ma mère revienne... J'ai pas bien compris, mais je ne me suis pas trop posée de questions non plus... J'ai bien vu que les dimanches suivants, on ne s'arretait plus chez elle...

Quand on est d'une famille athée, comme c'est le cas dans la mienne, il est difficile de donner une explication aux enfants... il n'y a pas de "elle est au ciel", "elle est partie rejoindre les anges, au paradis"... "tu ne le verras plus", voila tout...

A la Toussaint suivante, on est allés au cimetière, avec ma famille (je précise que je suis née un 1er novembre, c'était donc aussi mon anniversaire) et là on m'a dit "on va voir la mémé Alexina"... moi j'étais contente, ça faisait longtemps que je ne l'avais pas vue... on est arrivés devant sa tombe... j'ai lu son nom dessus, y avait plein de jolies fleurs et on en a encore mis d'autres... et pour la première fois de ma vie, j'ai vu mon grand-père pleurer... surprise, je lui ai pris la main, et je lui ai demandé "pourquoi tu pleures ?"... "elle me manque" m'a t-il répondu. Sa réponse m'a laissée perplexe : "mais pourquoi elle te manque ? elle est là" dis-je en désignant la tombe... il m'a jeté un drôle de regard, j'ai senti que j'avais peut-être dit une connerie, en tout cas c'était pas la réponse qu'il aurait fallu... c'est là que ça a commencé à me travailler, tout ça... je n'ai ajmais pu me satisfaire des "tu comprendras quand tu seras plus grande"...

J'ai reparlé de cette scène avec mon grand-père (que j'aime !) il y a quelques mois... il m'a dit en rigolant : " ce jour-là, j'ai su que t'allais être spéciale"...


Suite à cela, ayant compris que j'avais répondu un truc qui ne convenait pas aux adultes, j'ai commencé à poser plein de questions, auquelles on n'a pas voulu répondre : "tu comprendras quand tu seras grande !"... "mais arrete de parler de ça !!!" "c'est pas pour les enfants...", et tout le mystère qui entourait tout ça m'a un peu porté sur le ciboulot, jusqu'à en devenir une véritable obsession... qui me poursuit encore à l'âge adulte aujourd'hui, puisque j'ai voulu être médecin légiste, fait un bref passage aux pompes funèbres, cherché à faire une formation en thanatopraxie, pour finalement devenir arnchéo-anthropologue funéraire... et passer mon temps à faire des photos dans les cimetières... ajoutons à cela qu'étant née le :lol: 1er novembre, on m'emmenait systématiquement au cimetière pour mon anniversaire et que je trouvais ça très cool, je me suis en fait construit une sorte de mythe personnel de la Mort, qui me fait penser qu'ayant la chance de ne pas la craindre, je dois creuser (sans mauvais jeu de mots) le sujet, travailler dans ce domaine, parce que je me la suis appropriée...

Néanmoins, je suis bien persuadée que si on avait pu me donner des réponses concretes à mes questions, enfant, du style "son coeur a arreté de battre"... ça m'aurait très bien convenu, au lieu d'en faire tout un mystère qui me plonge dans l'obsession...

le problême, c'est que pour pouvoir parler de la mort sereinement, il faut être au clair avec sa propre mortalité, ce qui n'est pas le cas de la majorité des gens...

je pense pour ma part qu'il est très très important de ne pas tenir les enfants à l'écart de la mort, quand elle survient dans l'entourage proche, d'expliquer, et si l'on est athé, de mettre l'accent sur la survivance de la personne au travers du souvenir que l'on en garde, que penser aux morts et prendre soin d'eux (de leur tombe précisement) peut rendre le deuil plus facile, particulièrement pour l'enfant qui a besoin de se sentir acteur pour ne pas craindre quelque chose dont il se sent totalement étranger.

du style : "on va regarder les photos, tu te souviens, mamy était venue ce jour là... " parler du mort, et "viens, on va aller mettre des jolies fleurs pour papy" et on va faire un tour au cimetière... ce sont des choses dans lesquelles l'enfant se sent acteur, et dans la proximité du défunt, dans le souvenir, ou dans la présence physique de la sépulture, et qui aide à garder la mort dans la réalité des choses, et à ne pas l'envisager comme un truc qui fait peur, et qui va nous manger.

Je pense que ce dialogue autour de la mort est super important pour la construction de l'enfant.

Il y a un petit article sur le sujet p. 48 du numéro de "psychologies" de novembre (2006)... d'après eux c'est une préoccupation tout à fait normal entre 6 et 12 ans...

et je vous en ai mis une tartine, excusez moi... :oops:
71 ans Charente Maritime 3080
Je ne trouve pas ta réponse trop longue, Karen, au contraire. Je m'y retrouve parce que je suis moi-même athée, mais athée première génération. Autrement dit, j'ai reçu une éducation religieuse, j'ai comparé les système religieux et j'en ai conclu que les religions étaient des mythes. Je suis mariée avec quelqu'un qui a exclu toute pratique religieuse de sa vie, même s'il croit encore.

Mais le bon côté des mythes, c'est justement qu'ils ont des réponses à nous donner sur les grandes questions fondamentales, et notamment sur la mort. J'ai passé ma vie de mère à constater que je n'avais pas de réponse toute prête à fournir à mes enfants, alors que la religion me les avait données. Je devais réinventer le fil à couper le beurre pour chacune de ces questions. Et la mort n'y échape pas. Je comprends donc le manque de réponses que tu as eu, surtout que la psychologie pour enfant ne faisait que naître et qu'il n'y avait pas d'autres réponses à ces questions que celles données par les contes, les mythes et les religions. Nous n'en étions même pas conscients.

Mais en tout cas, tous les témoignages semblent pour l'instant aller dans le sens : ne pas laisser l'enfant sans réponse, même si son attitude nous désempare.
B I U