Tout d'abord je me permets de conseiller la lecture de l'excellent livre de Dana CASTRO "la mort pour de faux et la mort pour de vrai", chez ALbin Michel, dans la collection "Questions de parents", sorti en 2000...
Citation:Réelle ou imaginaire, la confrontation avec la mort est, chez l'enfant, source d'un vif questionnement. Les adultes, mal à l'aise quand ils n'en font pas un sujet tabou, n'osent pas en parler avec lui. Pourtant l'enfant est sans cesse confronté à la mort, que ce soit dans les médias, les contes, les jeux, quand ce n'est pas dans sa vie personnelle. Dana Castro, psychologue clinicienne, aborde les questions que les parents peuvent se poser : - A quel âge l'enfant découvre-t-il la notion de mort ? - Que recouvre sa peur de la mort ? - Faut-il s'inquiéter de la forte présence du thème de la mort dans les jeux ? - Pourquoi la perte d'un animal domestique est-elle si douloureuse ? - Comment l'enfant perçoit-il le deuil que vit l'un de ses parents ou la maladie grave d'un proche ? - Que signifient ses éventuelles conduites suicidaires ? - Que représente pour l'enfant la mort d'un parent ? - Comment comprendre les réactions, parfois surprenantes, des enfants face à la mort ? - Quelle est la spécificité du deuil chez l'enfant ? Un ouvrage qui permet aux parents d'aborder plus facilement un sujet délicat et d'apporter ainsi une aide indispensable à l'enfant lorsque la mort survient "pour de vrai".
Ensuite... pour parler de mon expérience personnelle... Je suis issue d'une famille athée, ce qui n'est pas toujours aisé justement pour répondre au questionnement des enfants, mais c'est comme ça.
Ma première confrontation avec la mort a été le décès d'une de mes arrière-grand mère, j'était au CP... j'étais assez attachée à elle. Je copie/colle ce que j'ai écrit dans une note de mon blog
La mort n'en saura rien :
Citation:Elle est morte... moi je ne savais pas ce que ça voulait dire, "être morte"... on m'a juste dit que je ne la verrais plus. L'enterrement était en semaine, puisque j'étais restée exceptionnellement en étude, à l'école, le temps que ma mère revienne... J'ai pas bien compris, mais je ne me suis pas trop posée de questions non plus... J'ai bien vu que les dimanches suivants, on ne s'arretait plus chez elle...
Quand on est d'une famille athée, comme c'est le cas dans la mienne, il est difficile de donner une explication aux enfants... il n'y a pas de "elle est au ciel", "elle est partie rejoindre les anges, au paradis"... "tu ne le verras plus", voila tout...
A la Toussaint suivante, on est allés au cimetière, avec ma famille (je précise que je suis née un 1er novembre, c'était donc aussi mon anniversaire) et là on m'a dit "on va voir la mémé Alexina"... moi j'étais contente, ça faisait longtemps que je ne l'avais pas vue... on est arrivés devant sa tombe... j'ai lu son nom dessus, y avait plein de jolies fleurs et on en a encore mis d'autres... et pour la première fois de ma vie, j'ai vu mon grand-père pleurer... surprise, je lui ai pris la main, et je lui ai demandé "pourquoi tu pleures ?"... "elle me manque" m'a t-il répondu. Sa réponse m'a laissée perplexe : "mais pourquoi elle te manque ? elle est là" dis-je en désignant la tombe... il m'a jeté un drôle de regard, j'ai senti que j'avais peut-être dit une connerie, en tout cas c'était pas la réponse qu'il aurait fallu... c'est là que ça a commencé à me travailler, tout ça... je n'ai ajmais pu me satisfaire des "tu comprendras quand tu seras plus grande"...
J'ai reparlé de cette scène avec mon grand-père (que j'aime !) il y a quelques mois... il m'a dit en rigolant : " ce jour-là, j'ai su que t'allais être spéciale"...
Suite à cela, ayant compris que j'avais répondu un truc qui ne convenait pas aux adultes, j'ai commencé à poser plein de questions, auquelles on n'a pas voulu répondre : "tu comprendras quand tu seras grande !"... "mais arrete de parler de ça !!!" "c'est pas pour les enfants...", et tout le mystère qui entourait tout ça m'a un peu porté sur le ciboulot, jusqu'à en devenir une véritable obsession... qui me poursuit encore à l'âge adulte aujourd'hui, puisque j'ai voulu être médecin légiste, fait un bref passage aux pompes funèbres, cherché à faire une formation en thanatopraxie, pour finalement devenir arnchéo-anthropologue funéraire... et passer mon temps à faire des photos dans les cimetières... ajoutons à cela qu'étant née le :lol: 1er novembre, on m'emmenait systématiquement au cimetière pour mon anniversaire et que je trouvais ça très cool, je me suis en fait construit une sorte de mythe personnel de la Mort, qui me fait penser qu'ayant la chance de ne pas la craindre, je dois creuser (sans mauvais jeu de mots) le sujet, travailler dans ce domaine, parce que je me la suis appropriée...
Néanmoins, je suis bien persuadée que si on avait pu me donner des réponses concretes à mes questions, enfant, du style "son coeur a arreté de battre"... ça m'aurait très bien convenu, au lieu d'en faire tout un mystère qui me plonge dans l'obsession...
le problême, c'est que pour pouvoir parler de la mort sereinement, il faut être au clair avec sa propre mortalité, ce qui n'est pas le cas de la majorité des gens...
je pense pour ma part qu'il est très très important de ne pas tenir les enfants à l'écart de la mort, quand elle survient dans l'entourage proche, d'expliquer, et si l'on est athé, de mettre l'accent sur la survivance de la personne au travers du souvenir que l'on en garde, que penser aux morts et prendre soin d'eux (de leur tombe précisement) peut rendre le deuil plus facile, particulièrement pour l'enfant qui a besoin de se sentir acteur pour ne pas craindre quelque chose dont il se sent totalement étranger.
du style : "on va regarder les photos, tu te souviens, mamy était venue ce jour là... " parler du mort, et "viens, on va aller mettre des jolies fleurs pour papy" et on va faire un tour au cimetière... ce sont des choses dans lesquelles l'enfant se sent acteur, et dans la proximité du défunt, dans le souvenir, ou dans la présence physique de la sépulture, et qui aide à garder la mort dans la réalité des choses, et à ne pas l'envisager comme un truc qui fait peur, et qui va nous manger.
Je pense que ce dialogue autour de la mort est super important pour la construction de l'enfant.
Il y a un petit article sur le sujet p. 48 du numéro de "psychologies" de novembre (2006)... d'après eux c'est une préoccupation tout à fait normal entre 6 et 12 ans...
et je vous en ai mis une tartine, excusez moi... :oops: