Effectivement, la réalité doit être tout autre que celle que j'imagine. Je viens de comprendre cela en lisant un article dans "courrier international" qui reprend un extrait du journal flamand De morgen. Il s'agit d'une bonne synthèse.
Citation:
BELGIQUE • Le royaume n’est pas mort, il suffit de se parler
Le 13 décembre, en faisant croire que la Flandre avait proclamé son indépendance, la télévision wallonne a peut-être permis aux Belges de prendre conscience du fossé qui sépare les deux communautés.
On peut comprendre que quelqu’un déclare, après quelques verres de bière, au cours d’une longue journée à la rédaction : “Refaisons le coup d’Orson Welles.” Mais que cette idée soit effectivement mise en pratique, après des mois de préparation, à l’aide d’importants moyens et de toute la hiérarchie, c’est raisonnablement incompréhensible.
Qu’est-ce qui a motivé la rédaction de la RTBF au point de mettre de côté sans honte le premier et le plus important des commandements du journalisme ? A savoir : faire de son mieux chaque jour pour coller aussi près que possible à la vérité, avec les moyens dont on dispose. Pour un théoricien du complot comme Pieter De Crem [le chef du groupe chrétien-démocrate flamand au Parlement fédéral], c’est assez évident : Guy Verhofstadt [le Premier ministre fédéral, membre du Parti libéral flamand] et Alain Gerlache, son ancien porte-parole et actuel dirigeant de la RTBF, ont tout manigancé.
Il faut bien constater que De Crem ne connaît rien au journalisme quand il parle de complot contre les Flamands. Les journalistes de la RTBF ont notamment voulu montrer que, dans le sud du pays, la perception de la Flandre est devenue tellement négative qu’on ne considère plus ce scénario de scission comme une affaire totalement anormale. Que le séparatisme n’est pas considéré, en Flandre, comme un scénario catastrophe agité par le Vlaams Belang [parti d’extrême droite flamand]. Bien sûr, la description était caricaturale et pourrait être interprétée par certains comme de la propagande antiflamande, mais il ne faut pas oublier que la Wallonie est depuis des années affublée de tous les péchés d’Israël et décrite comme un pays de profiteurs et de paresseux.
Yves Leterme [le ministre-président chrétien-démocrate de la Région flamande] a raison de dire que ce raisonnement est simpliste, mais lui-même et son cartel [son alliance avec le N-VA, parti indépendantiste flamand] alimentent cette description, notamment en adoptant une ligne communautaire de plus en plus dure [voir le dossier “La fièvre flamande”, CI n° 829, du 21 septembre 2006]. Les Wallons ont tellement peur qu’ils plongent facilement dans la psychose et l’anxiété. Il ne s’agit pas d’un complot, mais d’une réalité sociétale qui atteint son point culminant quand la presse et les politiciens francophones s’en emparent. Aller à la négociation communautaire [les Flamands demandent une redéfinition des pouvoirs dans le pays après les élections législatives du printemps 2007] dans un tel climat comporte de fameux obstacles. Mais, à moins qu’il ne proclame vraiment de manière unilatérale l’indépendance de la Flandre, Yves Leterme a besoin des francophones, avec ou sans complot, pour une prochaine réforme de l’Etat.