Angia, tu as bien fait de le signaler car effectivement je ne l'avais pas vu.
Angia a écrit:C'est très vrai. Pour moi j'ai ressenti ça assez fortement au début de ma RA, et ça a été pour moi une étape assez importante dans mon "acceptation" de moi (faute de meilleur terme) : le fait de considérer que mon corps n'est pas étranger à mon esprit, que mon corps c'est moi aussi et qu'à me battre contre lui c'est en fait contre moi que je me bas. Je lis souvent ces témoignages ici, de filles qui considèrent leur corps comme un étranger, qui fait des choses qu'on ne comprend pas, contre lequel on se révolte. J'ai trouvé que l'acceptation des sensations de mon corps comme des choses qui font aussi partie de moi a été très libérateur et apaisant.
Ce n'était pas forcément non plus ce que je me représentais de la RA au début, mais plus j'ai lu à son sujet plus j'ai ressenti aussi qu'il s'agirait de céder le contrôle à qui lui revenait en matière d'alimentation. Et je ressentais que ça ne serait pas une évidence.
Pour ma part j'avais une expérience extrêmement douloureuse avec mon corps, je me détestais et éprouvais une honte intense, depuis enfant, j'avais aussi l'impression de le subir et de souffrir de lui comme s'il était hors moi et mauvais. Bref, c'était pas la joie. Ce n'est pas la RA qui m'a libéré de cela, ça a commencé par le mouvement, quand j'ai retrouvé la marche, (très très) progressivement, que les douleurs ont commencé à s'estomper et surtout, surtout, quand j'ai commencé à ressentir du plaisir dans le mouvement. Ça m'a permis de vivre mon corps autrement, de l'intérieur, même si de l'extérieur ça restait toujours très douloureux. Et ce changement, je crois que c'est grâce à ça que j'ai
pu m'engager dans la RA.
Après, la RA m'a permis de consolider ce premier temps de découverte/appropriation, et ça s'est poursuivi, ça n'a plus concerné seulement mon ressenti (plutôt intérieur), ça concerne maintenant aussi mon regard, mon image, chose qui n'était pas là avant.
La RA ça a été un deuil douloureux par rapport à mon corps,
j'ai ressenti quelque chose aussi qui approchait de ce que risperdalconsta décrit, et je pensais que ça allait s'arrêter là. Comme c'était déjà moins violent qu'avant, je trouvais ça déjà mieux.
Mais ce ressenti de perte (deuil), ça a aussi été un ressenti de liberté, quelque chose qui tombe et qui a laissé place à autre chose.
Comme dit Angia, c'est apaisant. Et vivant.
(Cela dit, y'a encore beaucoup de chemin à faire.)
LovelyLexy a écrit:En fait, la libido est bien vue désormais, mais super sous contrôle aussi ( il faut avoir un certain nombre de partenaires, tester telle ou telle pratique, etc).
mamykro a écrit:Oui, mais c'est le chemin inverse de la faim: on nous dit de boire et d'avoir tout le temps de l'eau sur soi pour ne pas avoir soif, alors qu'on nous dit de ne pas manger, même si on a faim.
[...] Donc la faim est quand même traitée de façon à part, parmi toutes les sensations corporelles. Pourquoi??
Merci de cette nuance, je ne l'avais pas perçue et maintenant que tu la soulignes ça me paraît carrément évident et important.
J'ai cité aussi Lovelylexy car c'est en lien pour moi (même si je ne sais pas si je vais arriver clairement à expliquer pourquoi).
Je me dis que, que la réponse soit dans le trop ou le pas assez, qu'il s'agisse de codifier et légiférer, au final, dans son essence,on retrouve un même mouvement de tenter de nier quelque chose qui nous échappe.
Sur la sexualité, je me souviens d'avoir lu un bouquin il y a très longtemps sur la libération présumée de la sexualité aujourd'hui. Ce n'était pas le seul sujet mais c'était intéressant. Je devrais le relire rien que pour voir ce que j'en pense aujourd'hui. Je me souviens que je n'étais pas toujours d'accord mais que ça m'avait posé des questions (c'était l'antimanuel d'éducation sexuelle si quelqu'un le connaît ?)
J'y pense car l'idée de contrôle de la sexualité y apparaissait comme plus présente qu'avant, si mes souvenirs ne déforment pas trop - ou comment parler pour ne rien dire :oops: .
Mais mamykro tu dis: ce n'est pas dans le même sens que ça se passe. Pourquoi avec la nourriture et pas avec le reste ?
Je me dis que l'on a quand même pas mal de discours qui ne sont pas "ascétiques", qui disent des choses plutôt contradictoires (qui nous rendent un peu fou) mais qui ne prônent pas que l'ascétisme. Est-ce vraiment la non satisfaction de la faim qui est promue, ou le contrôle de celle-ci ? C'est plutôt "mangez, ne vous privez pas, faîtes vous plaisir... mais pas trop ! et on va vous dire
comment.". J'ai l'impression que les discours jouent sur les deux tableaux: mangez, appréciez, profitez... mais ce plaisir est conditionné à un certain sacrifice, vous devez le mériter ou le payer (les fameux régimes d'après noël...), et surtout, vous devez le contrôler.
Je suis certaine qu'il y a sûrement plein de contre exemples, notamment dans certains milieux où la privation est promue plus que dans d'autres.
Je fais plein de détours mais la question de Mamykro m'a interpellé. Pourquoi la nourriture et pas le reste ?
Est-ce que ça peut venir du fait que l'alimentation est un des besoins instinctuels les plus "affectés" (avec d'autres bien sûr)? Le sommeil me paraît un peu moins investi d'émotions ou d'enjeux relationnels. La nourriture, beaucoup plus. Je pense aux nourrissons qui ne dorment pas, cela ne sera pas pris dans les mêmes ressentis que ceux qui refusent de manger par exemple.
Je me dis aussi que c'est l'un des besoins les plus "socialisés" dans le sens où quand il s'agit de satisfaire ma libido ou ma fatigue, en général, on le fait dans la sphère intime et pas forcément publique. (Et encore, quand je dis ça je ne suis pas tout à fait d'accord, vu que je ne sais plus trop qu'est ce qu'est la sphère privée aujourd'hui.)
Je pense en même temps que je vous lis et vous écris, donc désolée pour le côté un peu brouillon et toujours aussi long, mais c'est les choses qui me sont venues en vous lisant et qui sont à affiner. C'est fou toutes les choses auxquelles ça me fait penser, merci :-)