MademoiselleK a écrit:Je ne comprends pas bien en quoi cela devrait nous éloigner des autres , dans ce cas là le simple fait d'appartenir à une groupe d'amis bien précis m'éloigne des autres , le simple fait de choisir une activité sportive précise par exemple m'éloigne des autres .
Tu parles de précision mais ici , personne ne " s'enferme " justement.
Bien sûr que tout groupe (familial, amical, professionnel...) nous sépare des autres (on ne traite pas sa famille comme ceux qui n'en font pas partie, on ne traite pas ses amis comme ceux qui sont des inconnus, etc.) mais ce n'est pas la question. La vie humaine est faite de ces cercles, choisis ou non, auxquels on appartient (même si certaines écoles de pensée ont tenté de théoriser leur suppression, mais ne faisons pas de HS). Aimer c'est choisir, élire, discriminer.
Là où la démarche commence à me gêner c'est quand tu vas vers des cercles à cause d'une "particularité" que tu mets en avant (sexe, couleur, religion, obésité...). Pour moi c'est simplement une démarche intellectuelle impossible. Non seulement je ne suis guère attirée par les gens qui me ressemblent, mais souvent je recherche même plutôt le contraire. L'idée d'une soirée entre obèses me remplit de tristesse au plus haut point. Cependant jamais je n'aurais employé une expression comme "zoo" pour la qualifier. Je ne sais plus qui l'a fait, mais c'est vraiment dommage de réduire la critique de ce type d'événement à l'emploi de cette expression maladroite et même insultante. Je ne suis pas insensible, et j'ai bien conscience que pour certains ça peut être un réconfort émotionnel de se retrouver "entre soi", surtout après des années de souffrance voire de mise à l'écart. Moi ça approfondirait ma tristesse plus que ça ne l'allègerait. Mais je ne suis pas débile, je sais bien que d'autres fonctionnent différemment.
Quant à cette phrase: "Je comprends qu'on se lasse des débats sur internet, ou ailleurs, quand on refuse d'employer les mots avec précision."
Toad, je ne sais pas pourquoi tu te sens spécifiquement visée. Dans mon souvenir, ce n'est pas toi qui prenais pour quasi synonymes "communautaire" et "discriminant" (comme si c'était grave de toute façon! on est là pour en discuter...). De surcroît, je ne vois vraiment pas pourquoi tu serais désignée comme quelqu'un manquant de précision, tu n'interviens pas fréquemment mais il me semble que tu fais toujours un effort pour élaborer ce que tu dis. Cette remarque, évidemment, me concerne autant que n'importe qui (encore un truc qu'il est délirant de devoir préciser! mais bon...). J'ai effectivement eu l'occasion sur un autre post ("Nicolas Bedos m'a traitée de pute, dois-je m'en offusquer ou l'embrasser avec la langue?") de dire mon attachement aux mots, mon goût pour la précision, mais aussi pour le chaos, de la langue. Ce n'est pas une manière de me vanter (comme certaines âmes de cour de récré font parfois semblant de le croire), c'est une exigence que je m'inflige d'abord à moi-même. J'exprime un idéal qui est le mien, mais j'ai largement eu l'occasion de constater que ça n'était pas celui de tout le monde.
Là où tu trompes, Toad, c'est en parlant de gens qui "causent pas bien comme il faut". Bien que je l'aie répété moult fois sur le forum et sur les blogs, je n'ai aucun mépris pour les
fautes de français. Moi-même j'ai mis des années à maîtriser à peu près cette langue qui n'est pas pour moi maternelle, ensuite j'ai encore consacré bien du temps à essayer d'aider à mon tour des gens qui ne la maîtrisaient pas, etc. J'ai du mépris, c'est vrai, pour ceux qui prétendent être fiers de leur ignorance: j'en ai pas besoin, je t'emmerde, c'est pas important, je peux vivre sans, j'ai que 20 ans et j'ai le temps d'apprendre, etc. Pour avoir constaté de très près les dégâts que l'ignorance de la simple langue pouvait causer, notamment chez les immigrés mais aussi sur des natifs du territoire, le rétrécissement du champ des possibles et notamment professionnels, jamais je ne baisserai les bras devant un tel discours (entendu plutôt sur les blogs qu'ici sur le forum, il faut l'avouer).
Alors, quand tu opposes ceux qui "font des phrases et le montrent" et ceux pour qui "ce sont les idées qui comptent" (te mettant bien sûr toi-même dans la catégorie la plus valorisante, Toad), je crois que tu te trompes profondément. La langue n'est pas pour moi une dentelle décorative ou un moyen de briller dans les cocktails de Monsieur l'Ambassadeur (je me suis même battue toute ma vie contre cela mais ce n'est pas le lieu d'en parler). La langue n'est même pas pour moi le "véhicule" plus ou moins adéquat de la pensée. J'ai appris à parler et à penser en même temps, du même mouvement. Je ne connais pas de différence entre s'exprimer clairement et avoir les idées claires. Plus de puissance de langue c'est plus de puissance de pensée (j'ai bien dit "puissance"... merci de ne pas lire cette phrase comme "c'est ceux qui causent le mieux la France qui zy sont les plus intelligents", je me méfie maintenant des interprétations vers le bas).
Il y a même un rapport entre l'usage qu'on fait des mots d'une part, et le refus d'être réduit à sa spécificité (femme, blanche, obèse, hétérosexuelle, etc) d'autre part. Mais j'ai assez monopolisé le bâton de parole et donné à la discussion une tournure trop autobiographique.
C'est juste que les obèses qui refusent d'aller à ce genre de soirées m'intéressent, et j'aimerais qu'elles développent le pourquoi, tout comme celles qui s'y trouvent à leur aise. J'ai assez développé mes propres raisons je crois.